Je pense au contraire qu’il faut plus de démocratie, et voici pourquoi.

De tout temps, l’État s’appuie sur un principe d’autorité tel que l’ordre, et la loi même, le défend envers et contre tout, y compris quand il s’agit de crime (voir par exemple les révélations récentes de disclose.ngo au sujet du Yémen).

Parce qu’il y a une différence entre morale individuelle et morale de gouvernance ; celle-ci est, par nature, le fait du pouvoir dans ce qu’il a de plus de plus systématique, de plus gestionnaire, de plus technocratique – voir de plus inhumain. C’est constitutif et incontournable.

D’autre part, la sociologie de l’époque montre que les gens prennent de plus en plus parti : il y a des effets néfastes, telle une polarisation trop forte, mais je crois qu’il est encore plus dangereux – et stupide – de vouloir contenir des engagements dans l’impuissance : ce n’est pas seulement contre-productif, et de là opposé à la gouvernance, c’est malsain pour toute la société, qui se prive là des mécanismes de résolution et de libération.

Il faut aussi se demander ce qu’est un peuple ; à la différence d’une population, il se constitue ou se refond dans la population, selon la temporalité historique. Les effets de seuils du RIC par exemple représentent très bien cette caractéristique et assurent que le peuple à qui l’on donnerait plus de pouvoir est un peuple politiquement constitué.

Quant aux dérives d’une démocratie « pure », c’est une simple question technique : si la peine de mort est déclarée anti-constitutionnelle, le danger est éliminé. Même si la démocratie pousse à être constituante (ce qui n’est qu’une facette dans la façon dont on peut avoir plus de démocratie), on peut très bien imaginer des procédés constituants encadrant les fondamentaux.

Il ne faut pas oublier que l’émergence de ces questions est liée à des changements profonds surgissant lorsque des accords historiques (en l’occurrence, la représentativité du peuple par la classe bourgeoise) n’arrivent plus à répondre. Il est alors de la responsabilité du pouvoir de considérer et d’agir en conscience ; c’est ainsi qu’une situation devient plus saine. Aucun pouvoir ne gouverne de façon constructive contre un peuple qui se réveille.

La question est au fond d’avoir un pays qui saisi sa chance en donnant forme aux énergies historiques, ou de les confondre et de les réprimer pour gouverner fièrement sur un pays meurtri, triste et découragé.